Test :
Black Ritual

Temps joué : 50 min


Introduction

Avec ses 50 minutes de jeu, Black Ritual est l’un des jeux les plus courts que j’ai testé lors de cette session, et pourtant ce n’est pas le plus simple à traiter, loin de là ! Le fait qu’il s’inscrive dans une série (pour l’instant une trilogie de jeux et une série de livres) n’aide pas à la compréhension générale du titre.

En fait, le tout est tellement chaotique que pour la première fois de ma vie j'ai été obligé de faire un mur de post-its pour ordonner toutes les informations que le jeu nous donne, et essayer d'en extraire l'histoire :


Black Ritual nous met donc dans la peau d’Elysis, une jeune elfe apparemment kidnappée par une secte pour faire partie d’un rituel occulte.




Awards généraux et spécifiques

Meilleur Univers (Note : 3/5)

Ça me fait un peu de peine de ne donner que 3 à l’univers, quand on sait à quel point l’auteur a bossé sur son background et son contenu. Mais force est de reconnaître que l’univers développé dans Black Ritual ne fait pas honneur à l’univers global de Dymunia.

Certaines informations que le jeu nous donne sont supposées étendre l’univers mais ne le permettent pas. Par exemple, on nous montre assez tôt dans le jeu une carte du monde, mais à quoi ça sert si je ne sais ni d’où vient l’héroïne, ni où elle se trouve ? D’autant que l’héroïne connaît ces deux informations, comme on l’apprend plus tard... Si je ne peux pas utiliser cette carte pour me situer l’action du jeu, le développement de l’univers qu’elle permet est très limité.

Résultat : on peut sentir que l’univers est intéressant. On voit que les personnages ne sont pas tout blanc ou tout noir : Hellios, malgré son statut de dieu de la lumière défendant la liberté individuelle, commet plusieurs actions contestables. L'histoire des dieux qui se partagent (ou plutôt se disputent) les pouvoirs d’un ancien démon lovecraftien, c’est un super élément de background.
En réalisant mon mur de post-its, je me suis même rendu compte qu’il y avait au moins trois factions aux objectifs conflictuels qui s’opposent, ce qui est l’assurance d’un univers assez intéressant. Mais au final on ne connaît les objectif que d’une seule de ces trois factions, ce qui ne nous permet pas d’apprécier tout l’intérêt de cette opposition.

Donc on peut sentir que l’univers est intéressant, mais il n’est pas suffisamment développé dans le jeu pour montrer tous ses enjeux et tout son intérêt.

En fait le jeu ressemble à un spin-off : un jeu supplémentaire qui étend l’histoire développée par un autre jeu, et dont l’histoire est bâtie autour de celle du jeu principal.
Un exemple tout bête c’est le vieil anneau donné par Lucien à Elysys au début du jeu, qui est un bon vieux Mc Guffin dont l’utilité est invisible dans ce jeu là. Le mieux qu’on puisse remarquer, c’est le symbole sur l’anneau qui est identique à celui de la porte magique, mais même ça ça n’a de sens que lorsqu’on sait ce que représente ce symbole (ce qui n’est jamais expliqué en jeu).
Il en va de même pour Lyla, une jeune fille que l’on libère vers la fin du jeu, mais qui ne sert à rien dans cette histoire là.

Le développeur recommande de jouer à Arch Ultra avant de jouer à cet opus, mais Arch Ultra n’est pas terminé, et la démo à laquelle j’ai joué n’aide pas vraiment à comprendre Black Ritual...

Meilleure Narration (Note : 3,5/5)

Black Ritual est paradoxal, car malgré une narration extrêmement linéaire, il demande tout de même un grand effort de la part du joueur pour comprendre son histoire.

En fait, la linéarité de la narration rapproche plus le jeu d’un visual novel que d’un RPG ou d’un jeu d’aventure.

Les astuces utilisées pour être certain que le joueur voit toutes les informations sont diverses, certaines assez élégantes et subtiles, d’autres aussi lourdes qu’un éléphant en armure de plaques. Parmi les plus lourdes, on notera l'héroïne qui refuse de sortir d’un bureau tant qu’elle ne l’a pas fouillé de fond en comble à la recherche d’informations. Parmi les plus élégantes, on notera les portes fermées à clef qui nous obligent à chercher la clef dans l’environnement, ce qui incite fortement le joueur à interagir avec le décor.

Bien que je préfère habituellement avoir la liberté de rechercher (ou non) moi-même dans les décors les informations concernant l’univers, je dois dire que compte tenu de la complexité de l’histoire de Black Ritual, la linéarité de la narration est appréciable. L’effort est reporté sur les liens que le joueur est invité à faire entre tous les éléments qu’il a, de manière à reconstituer l’histoire façon puzzle.
Et j’avoue que malgré la complexité de mon mur de post-its, j’ai pris un certain plaisir à le faire, et le tout obtenu est assez satisfaisant.

Il y a un aspect presque cauchemardesque dans la narration. La succession très rapide de séquences sombres et dérangeantes, l’ histoire complexe difficile à comprendre dans sa globalité, et la faiblesse de notre personnage, incapable de se défendre et manipulée comme une pièce d’échec, font ressembler le tout à un véritable cauchemar... Cela retranscrit bien ce que doit ressentir Elysys, enfant perdue au milieu de ces événements qui la dépassent.
Cette ambiance cauchemardesque est probablement l’effet voulu par le développeur, car si l’on considère l’histoire autrement, Elysys est probablement le pire point de vue imaginable pour raconter une histoire avec un début, un milieu et une fin : elle est née récemment et connaît peu de choses sur le monde, elle passe son temps à être manipulée par des gens qui ne veulent pas lui dire ce qui se passe, et elle meurt avant même que le grand « méchant » n’ait pu mettre son plan à exécution...

L’ambiance cauchemardesque qui se dégage du jeu est intéressante, et tisser le résumé de l’histoire à partir des éléments qui nous sont donnés devrait plaire à ceux que ça amuse. Pour ces deux raisons, je vais accorder une bonne note à cette catégorie, bien que je vais quand même la baisser à cause de la linéarité de la narration, parfois très lourde.
Maintenant, était-il judicieux d’opter pour ce choix créatif ? Le point de vue d’un personnage qui ignore tout et ne comprend pas vraiment ce qu’elle voit était-il le meilleur pour raconter cette histoire ? Je n’ai pas vraiment la réponse, tout dépend de la position de ce jeu vis-à-vis des autres de la série, mais je voulais soulever la question.

Meilleur Gameplay (Note : n/a)

Le gameplay est malheureusement assez pauvre, c’est aussi pour ça que j’avais rapproché le jeu d’un visual novel.

La principale séquence où il y a vraiment un effort pour proposer du gameplay au joueur est malheureusement mal exécutée. Je parle de la séquence d’infiltration dans la bibliothèque, que j’ai eu du mal à appréhender. Déjà, je trouve que le principe d’une séquence d’infiltration où l’on est invisible, mais où l’on fait tout de même du bruit, mais par contre les ennemis ne peuvent pas nous détecter s'il nous touchent, c’est difficile à appréhender (au début j’avais peur ne serait-ce que de me faire effleurer par un ennemi, alors qu’en fait ils peuvent nous traverser sans problème...)
Ensuite, le mouvement des ennemis n’est pas vraiment clair. Le jeu nous conseille d’avancer quand ils sont « occupés », mais c’est difficile de vraiment discerner quand les ennemis sont occupés et quand ils ne le sont pas.

Les autres phases de gameplay incluent un labyrinthe où l’on doit suivre le cri d’un oiseau, bien réussi bien qu’un poil longuet, et une phase d’exploration dans des souterrains, prometteuse dans son idée, mais décevante car son level design est très linéaire. Utiliser une structure plus complexe (de façon similaire à un donjon de Zelda) aurait permis de donner plus d’intérêt à cette zone, d’encourager le joueur à explorer encore plus les souterrains, et ça aurait aussi permis de lui donner une apparence plus crédible (voir la partie graphismes).
Bien sûr, pas la peine de faire quelque chose d’aussi complexe qu’un donjon de Zelda : une simple structure en étoile, avec une porte à l’entrée des branches et une clef à la fin des branches, pourrait suffire. Pour plus d’informations sur la construction de donjons à la Zelda, je ne peux que conseiller la série de vidéos de Game Maker Toolkit sur le sujet :
Secret (Cliquer pour afficher)
https://www.youtube.com/watch?v=ouO1R6vFDBo&list=PLc38fcMFcV_ul4D6OChdWhsNsYY3NA5B2&index=2&t=0s


Meilleurs Graphismes (Note : 2,5/5)

C’est difficile de ne donner que 2,5 aux graphismes, quand on voit la qualité du rendu final en termes purement visuels.

Les ressources utilisées sont vraiment très belles et efficaces. J’ai l’impression que Manpaint utilise un moteur de rendu 3D pour créer ses personnages, ce qui lui permet de faire plein de petites animations et postures sympa (le machin que je suppose être un serviteur d’Hélios qui lève le bras, les sentinelles des ombres qui manient l’épée, le sprite d’Elysys morte ensanglantée...). Le rendu est propre, homogène, et possède un style unique.

Mais là où les graphismes pèchent c’est côté création de cartes. L’enchaînement des cartes n’a aucun sens, et parfois les cartes elles-même n’en ont pas.
Par exemple, c’est incohérent que le chemin d’accès à la prison passe par une bibliothèque, parce que ça implique que tous les gens qui étudient à la bibliothèque sont dérangés à chaque fois qu’on veut faire entrer ou sortir un prisonnier. La personne qui a aménagé le chemin dans la forêt, elle, s’est donné la peine de faire un chemin bien sinueux qui doit être très embêtant à emprunter au quotidien, sans raison apparente (un chemin sinueux est généralement justifié par des obstacles naturels ou artificiels, par exemple la nécessité de contourner un bâtiment).
Et dernier exemple, ce souterrain qui n’a pas le moindre sens. C’est censé être un ancien laboratoire occulte, mais organisé sous forme d’un immense couloir, ce qui le rend impossible à utiliser en pratique et qui fait que le joueur n’y croit pas une seconde. Déjà on doit se taper des centaines de mètres de couloirs pour relier deux salles entre elles, ce qui est aberrant pour un lieu de travail (en plus il ne semble pas y avoir de lieu de vie dans ces souterrains, donc les gens qui travaillaient ici devaient se taper des centaines de mètres de couloirs tous les jours...). Ensuite, les tonneaux de sang ne sont pas stockés directement sous la cabane (ce qui serait logique), ils sont stockés quelques centaines de mètres de couloirs plus loin, ce qui implique que les gens qui amenaient ces tonneaux ici devaient les transporter sur cette distance à chaque fois, ce qui est une aberration du point de vue logistique. De la même façon, les sarcophages où les elfes étaient emprisonnés ne sont pas placés dans une salle dédiée, mais en plein milieu du couloir, ce qui encore une fois est une aberration d’un point de vue logistique.
Bref, tout cela fait que ce laboratoire n’est pas crédible pour le joueur, ce qui limite fortement son immersion dans l’univers.

Meilleure Ambiance Sonore (Note : 3,25/5)

La bande-son est discrète mais correcte. Les musiques choisies se répondent bien et collent bien à l’ambiance. On notera la présence d’une fonctionnalité très sympathique : la possibilité de voir dans le menu le nom et le compositeur de la musique en cours, ce qui est beaucoup plus efficace qu’une longue liste de musiques perdues dans les crédits de fin.
On déplorera tout de même une certaine inhomogénéité dans le mixage sonore. Si cela ne gênera pas forcément le joueur moyen, qui utilise des enceintes, c’est plus dérangeant pour les casques et pour les montages vidéo.

Meilleures Ressources Originales (Note : 3,75/5)

Dans la liste des crédits pour son jeu, Manpaint se crédite pour le « Game Design et Mapping ». Je suppose que comme beaucoup de personnes, il a fait la confusion entre Game Design et Direction Artistique, et je suis à peu près certain que les graphismes sont originaux, donc allons-y pour les graphismes.

Comme mentionné dans la partie graphique, les ressources en elles-mêmes sont homogènes entre elles, ont un style assez unique et sont assez agréable à l’œil (je veux dire que les personnages sont mignons). De plus, elles permettent tout un tas d’animations sympathiques qui seraient difficiles à faire en pixel art.


Conclusion (Note totale : 2,5/5)

Black Ritual est un jeu bourré de paradoxes. Un univers prenant et profond, mais insaisissable si l’on a pas joué aux autres jeux ; une narration extrêmement linéaire mais une histoire malgré tout difficile à comprendre ; des ressources graphiques excellentes mais des cartes aberrantes... Et ça le rend vraiment difficile à noter.

L’histoire m’a indubitablement touché. Elysys est attachante, et c’est un point de vue très original pour découvrir l’histoire qui nous est présentée (un jeu plus classique nous aurait probablement mis dans la peau d’un helliosien qui se révolte contre la secte pour une raison X ou Y, ou alors peut-être dans la peau d’un parent d’Elysys à sa recherche).

Les tentatives de rajouter des phases de gameplay au milieu de l’histoire ne sont pas toutes réussies, mais elles sont louables. Et alors que le concours vient de s’ouvrir officiellement à tous les types de jeux, y compris les visual novel, il me semble difficile de pénaliser le jeu pour son manque de gameplay.

Le principal défaut de Black Ritual, ce sont ses cartes incohérentes qui ne permettent pas l’immersion du joueur dans l’univers, et se privent aussi du coup de faire de la narration non-verbale (par exemple, le simple fait de voir un ancien dortoir donnerait au joueur des informations indirectes sur combien de gens vivaient ici et comment ils travaillaient, en plus du fait qu’ils dormaient sur place).
Pour ce qui est du reste, je considère que le jeu est un spin-off, qui cherche à nous faire vivre le cauchemar vécu par Elysys plutôt que de nous raconter une histoire du début à la fin. En cela, le jeu ne se suffit pas à lui-même, ce qui va aussi le pénaliser pour la note, mais il est plutôt appréciable, raison pour laquelle la note ne sera pas catastrophique.


Remarques diverses

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