Test :
Sentinelles la quête du temps démo 2016

Temps joué : 7 h


Introduction

Cette année encore a été soulevé le sempiternel débat sur les critères de sélection au pré-tests. Savoir si l'on retient tous les jeux qui ont fait l'objet d'un minimum de travail, ou seulement ceux qui ont une chance d'obtenir un prix. J'ai moi-même du mal à me faire une opinion définitive, mais Sentinelle est l'exemple parfait du genre de jeu qui me fait penché vers la première option. Je doute qu'il ait la moindre chance de remporter quoi que soit, je n'ai pas pris beaucoup de plaisir à y jouer, mais je suis content d'avoir écrit ce test. Son auteur a l'air motivé et plein de bonne volonté, et j'ai bon espoir que mon test l'aidera à progresser.


Awards généraux

Gameplay (Note : 0,5/5)

La fiche du jeu résume les points-clé du gameplay en un seul mot: "diversité". Et si cette diversité est en effet présente, c'est au détriment de toute consistance. Un nombre conséquent d'éléments de gameplay sont empilés assez vite. Outre les traditionnels combat en tour par tour, on a droit à de la pseudo-plateforme (la possibilité de courir et de sauter pour atteindre des coffres placés en hauteur), du crochetage de serrures, des QTE, des phases de recherche (chercher un objet ou une sortie dans une zone),... D'autres sont ajoutés plus tard dans le jeu au gré des époques (puisque l'histoire tourne autour des voyages dans le temps). Beaucoup ne sont utilisés que de façon très ponctuelle (le saut ne sert que deux fois en 7 heures de jeu), au point qu'on se demande pourquoi ces mécaniques ont été introduites en premier lieu (surtout que les premiers sessions de crochetages ont lieu aux 23ième siècle, sur des portes coulissantes du tur-fu, ce qui semble un poil anachronique).
L'un des collaborateur au jeu a déjà répondu, à propos du crochetage, que c'était dû à l'histoire qui comportait peu de moments où une telle mécanique était justifiée. Sauf que ça n'explique rien. C'est justement leur boulot de concevoir d'une part un core gameplay consistant qui puisse être conservé tout au long de l'histoire (en tenant compte des changement d'époque notamment), et d'autre part un "narrative design" qui laisse de la place pour exploiter ces mécaniques. Ici, la narration est ultra-linéaire. Elle se contente de nous faire traverser des maps d'un point A à un point B pour dérouler l'histoire, sans prendre le temps de créer un espace interactif consistent (j'en parlerais plus en détail dans la section "Level Design"). Et c'est tout le gameplay qui en pâtit. Les phases de recherche se limitent à des casses-têtes tout à fait insignifiants, ou à des allers-retours entre des portes, des interrupteurs, et des objets mis en évidence, dans un espace trop restreint pour qu'à aucun moment on ait véritablement besoin de chercher. L'implication ludique est nulle, ces séquences semblent plus des obstacles sans intérêt au déroulement de l'histoire, seul véritable objectif, et en deviennent plus agaçant qu'autre chose.
Il en va de même pour l'exploration au sens plus large (découvrir et fouiller les environnements), qui est la base de l'espace interactif susmentionné. Vaguement récompensée au début par un nombre relativement conséquent d'objets réparti dans le mobilier, ces objets sont assez rapidement mis directement dans les pieds du joueurs, dans des coffres ou des rangées de meubles facilement repérables, laissant le reste des maps pratiquement vide. Là encore tout semble fait pour maintenir le joueur dans les rails de l'histoire (ou, plus vraisemblablement, l'auteur a construit son jeu en suivant ces rails sans prévoir de marge pour s'en éloigner un tant soit peu). Et on en vient à s'interroger sur l'intérêt de ces objets. Puisque les magasins sont rares et que l'essentiel des objets sont ramassés sur le chemin, et puisque, de toute façon, la linéarité du jeu et l'absence de combat aléatoire supprime toute possibilité de prendre des risques vis-à-vis de l'exploration d'une part, et d'accumuler de l'argent d'autre part, la gestion de l'inventaire est insignifiante.
Le seul effet notable des objets sur le gameplay est de briser quelques peu la monotonie des combats. Sans pour autant y apporter la profondeur qui lui manque. Aucune recherche n'a visiblement était faite pour proposer un système un minimum stratégique. Les personnages n'ont pas de rôle défini et sont tous plus ou moins interchangeables. Tous accumulent les compétences d'attaques de plus en plus puissantes, certains possèdent des compétences plus spécifique mais franchement oubliables (le scan ne sert à rien, ils indiquent chiffre des stats qu'on peut déjà apprécier en combat, par des jauges pour les PV et PM, par les dégâts infligés et reçus pour le reste; le vol est inutile contre de nombreux ennemis, et renvoie de toute façon à la gestion de l'inventaire susmentionnée, qui n'incite pas spécialement à obtenir plus d'objets). Le système de "sphériers" permettant d'améliorer les statistiques des personnages ne fait rien pour corriger ça. Leur évolution, déjà limitée, est grandement freinée par le décalage entre les cases disponible et les gemmes nécessaires à leur activation. On accumule des sphères PV et PM, tandis que les autres se font rare. Dans tous les cas les sphériers ne semblent pas prévu pour permettre une quelconque spécialisation du personnage.
Le taux de réussite des altérations d'état est faible (celui des attaques et des compétences l'est un peu trop aussi d'ailleurs, ce qui est assez agaçant), et la plupart des compétences d'attaque en infligent, ce qui rend les compétences d'altération pures sans grand intérêt. Les altérations n'apportent donc pas grand chose aux combats, si ce n'est un peu d'aléatoire.
La stratégie se résume au final à classer les personnages selon les dégâts infligés, pour choisir arbitrairement un "soigneur" qui utilisera les objets de soins quand nécessaire, puis de spammer les compétences d'attaques les plus puissantes (vu la quantité d'objets de récupération de PM, ceux-ci ne sont pas un problème). En fait, c'est souvent plus intéressant de ne pas se soigner du tout, quitte à laisser mourir un ou deux personnages, pour infliger un maximum de dégâts le plus vite possible (afin de réduire rapidement le nombre d'ennemis, par exemple). La profusion d'objets de réanimation et l'absence de spécialisations des personnage font que la mort de l'un d'entre est sans importance.
Cette absence de profondeur mène assez naturellement à un équilibrage maladroit. Encore qu'il s'agisse moins de gérer la difficulté (comprendre fixer un objectif raisonnablement dur à atteindre avec la marge de manœuvre proposée par le gameplay, ce qui n'a pas vraiment de sens ici où la marge de manœuvre est quasiment inexistante) que de rester juste (s'assurer que l'objectif soit effectivement réalisable, et que le joueur possède des moyens acceptable pour le faire; puisque le joueur ne peut pas grinder pour augmenter les stats de ses personnages ou accumuler des objets, il serait injuste de le mettre face à des ennemis trop puissant ou de lui fournir trop peu d'objets). Ici encore, on subit les tribulations du scénario qui, en essayant d'apporter de la diversité, amène surtout de l'injustice, et donc de la frustration (réduire les dégâts infligés par certains personnages à zéro, les rendant pratiquement inutiles; confusion entre, d'une part, certains combats qui imposent une défaite scénarisée, laquelle est amenée par une compétence qui réduit les PV de tous les personnages à 10, alors que le combat en lui-même paraissait tout à fait gagnable (même avoir tous ses personnages à 10 PV ça parait pas insurmontable, dans certains cas), et d'autre part contre un ennemi avec masse de PV qui peut one shot certains personnages, qui peut laisser supposer une défaite scénarisée mais en fait non; ...).
Outre quelques mini-jeux éparses (le crochetage, les QTE, le test de tir,...) qui, malgré quelques défauts (les premiers QTE sont vraiment trop lents, et le fait que l'interface soit placé tout en bas de l'écran détourne l'attention du joueur de la scène que le QTE est sensé illustrer; l'apparition des cibles du test de tir est un peu trop aléatoire, se faire pourrir un essai qui démarrait bien parce qu'il n'y que des civils et des policiers qui apparaissent sur la fin c'est un peu frustrant, établir un quota sur chaque type de cible pour avoir un total à peu près constant à chaque partie ce serait pas mal; le crochetage manque un peu d'enjeu vu qu'on a plein de crochets, mais du coup on en revient à la gestion de l'inventaire restreinte et à la justice du gameplay) parviennent à nous procurer un peu d'amusement ponctuel (quand ils ne sont pas parasités par un des nombreux bugs que comporte le jeu), la majorité du temps le joueur subit le jeu qui le traine irrémédiablement vers la suite sans lui laisser le temps de souffler.


Histoire (Note : 1/5)

Plusieurs aspects du jeu sont sacrifiés au profit du déroulement de l'histoire. Mais paradoxalement, le scénario lui-même souffre de cette fuite en avant. Le jeu propose un univers riche, qui pourrait donner de la matière pour traiter différents thèmes. Malheureusement l'histoire se limite à un enchaînement effréné de péripéties qui traîne le joueur d'époque en époque (voyages dans le temps oblige) et du coq à l'âne sans avoir l'air de trop savoir où il va, et sans prendre le temps de développer quoi que ce soit. A la place, on a droit à une multiplication des personnages et des sous-intrigues, qui vont sans doute converger et prendre plus de sens par la suite, mais qui pour l'heure empêchent le joueur de cerner l'histoire. Là encore la diversité se fait au détriment de la cohérence.
On a beau guetter les indices, extrapoler l’émergence de certains thèmes (dans certains éléments de background, dans le choix des périodes historiques visitées), rien ne prend corps de façon concrète. On se retrouve même avec certains signaux contradictoires. D'un côté l'auteur semble avoir pris soin de dépeindre un contexte politique complexe en évitant tout manichéisme. Mais de l'autre plus le jeu avance, plus les antagonistes se dessinent comme une "société secrète du Nouvel Ordre Mondial des Illuminatis qui manipulent tout dans l'ombre", ce qui saboterait cet effort ainsi que les quelques thèmes intéressants qui semblent être effleurés de temps à autre (notamment la question du relativisme et de la notion de justice dans l'Histoire).
On ne peut pas non plus s'attacher aux personnages, creux et lisses, dont la seule fonction est de donner des informations au joueur. Ce qui donne lieu a des dialogues sans âme, aux tournures extrêmement austères et formelles (et parfois très maladroites) ainsi qu'à de nombreux soliloques inopinés, qui charcutent le rythme de certaines scènes en surchargeant le joueur d'informations alors que son attention est portée sur des évènements plus immédiats. Les maigres tentatives pour donner un semblant de personnalité aux personnages s'avèrent caricaturales et superficielles (je développerais ça plus en détails dans la section Personnages).
Tout ça procure une sensation assez paradoxale. Alors que l'histoire continue à foncer tête baissée, on en vient à s'agacer de sa lenteur. Car en réalité on attend impatiemment le moment où l'histoire s'arrêtera deux secondes pour prendre le temps de développer du contenu tangible, et nous proposer quelque chose auquel on puisse accrocher. On l'attend encore après les 7 heures de jeu que propose cette démo. Pour l'instant on doit se contenter de quelques miettes accordées à droite à gauche. Mises bout à bout elles semblent pointer un semblant de direction, qui à l'air plutôt intéressante, mais reste purement hypothétique.

Ambiance et immersion (Note : 1,5/5)

Pas grand chose n'est mis en œuvre pour favoriser l'immersion du joueur. J'évoque dans la section Level-Design l'absence d'un "espace interactif" consistant. Or c'est lui qui permet au joueur de trouver sa place dans l'univers du jeu, et d'insuffler de la vie à ce dernier. Pas plus d'effort n'est fait dans le scénario. Aucune pose n'est ménagée pour planter un décor, développer un contexte. On traverse les époques l'une après l'autre, en touriste. Les environnements semble tous artificiels, servant de simple décor pour les tribulations des personnages. Personnages auxquels on n'a guère plus de chance de s'attacher, tant ils sont creux et caricaturaux, et tant leurs objectifs et motivations sont flous.
Et la forme est aussi incertaine que le fond, employant des moyens très disparates. La plupart de la mise en scène est réalisé directement sur la map avec des animations de combats et les déplacements des sprites, mais on tombe de tant à autre sur des animations de sprites plus travaillées, des bruitages spécifiques, des séries d'artworks voire des séquences de films d'animation, qui n'ont pas d'autre d'effet que de sortir le joueur du jeu en se demandant "Tiens donc! D'où est-ce que ça sort?...". On retrouve un problème semblable durant les phases de jeux avec l'hétérogénéité de certaines ressources graphiques employées.
On a malgré tout droit à quelques séquences avec une ambiance relativement prenante. Notamment la mission de sauvetage dans les locaux de la CSA. La présence d'enjeux clairs et l'aspect exigu des maps (j'ai un doute sur le fait que ce soit prémédité, et pas juste une autre expression de la recherche de réalisme, mais toujours est-il que ça tombe à pique) permettent d'établir une atmosphère tendu et un véritable sentiment d'urgence (par contre pour proposer un dilemme entre tracer la quête principale ou prendre le temps d'accomplir une quête secondaire dans un temps limité, ça marcherait mieux si on avait pas l'accomplir les deux objectifs trois fois avec une pose clope au milieu dans le temps imparti). Mais cela reste très ponctuel.

Graphismes (Note : 2,25/5)

Pas grand chose à dire à ce niveau. L'auteur a pioché des ressources à droite à gauche, essentiellement du RTP-like assez populaire (du Celianna, par exemple). C'est joli, bien utilisé, mais forcément ça manque un peu de personnalité. On peut aussi déplorer certains éléments très hétérogènes, ainsi que des retouches maladroites de l'auteur (notamment des modification de couleur sur certains artworks qui piquent les yeux) qui font tâche au milieu du reste.

Bande-son (Note : 2/5)

Il en va de même pour la musique que pour les graphismes: un ensemble de musiques récupérées à divers endroits, plus quelques unes originales, globalement de bonne facture mais pas vraiment mémorables, et qui manquent un peu d'unité (on passe du midi à du mp3/ogg, et de la musique orchestral à de l'électro...). On trouve aussi quelques maladresse dans leur utilisation. Par exemple le fait que certaines séquence cinématiques soit accompagnées de la musique d'ambiance de la map, alors que la scène en question et la structure du récit dans laquelle elle s'insère nécessiteraient une ambiance différence, ou encore l'utilisation de chansons en musique d'ambiance. Il a été précisé ailleurs que ces chansons avaient été choisies spécialement pour l'adéquation des paroles avec la scène, et/ou servaient à mettre en place certains procédé de narration. Toujours est-il qu'une chanson est très différente d'une musique d'ambiance classique, elle possède une structure et un rythme qui lui sont propre, et qui doivent s'accorder avec ceux de la scène à laquelle on l'intègre, sans quoi les deux se court-circuitent, et les procédés de narration recherchés passent inaperçu.


Awards spécifiques

Level-design (Note : 1,5/5)

L'auteur a choisi de mettre l'accent sur le réalisme, notamment en terme de dimensions (adapter la taille des maps à la nature du lieu représentée) et de densité (meubler la map pour donner une sensation d'exiguïté ou de vide en fonction du lieu). Au premier abord, à en juger sur le rendu esthétique, c'est réussi. Les ressources graphiques sont bien utilisé, les maps sont plaisantes à l'oeil et, en effet, assez vraisemblables.
Malheureusement, ça se gâte quand on commence à les explorer. Car si l'aspect visuel est soigné, toutes les considérations fonctionnelles sont passées à la trappe. La présence des touches de course et de saut semble indiquer une volonté de valoriser l'exploration, mais rien dans le level-design n'encourage à explorer. Le saut est pratiquement inutile. La course a été assigné à la touche action, qui sert à interagir avec le décor, ce qui rend lesdites interactions confuses (d'autant plus que certaines interactions, choisies semble-t-il assez arbitrairement, se déclenchent simplement quand l'avatar passe à proximité de l'objet). Enfin, rien n'incite à s'écarter du chemin tracé par l'histoire. J'ai déjà évoqué dans la section Gameplay la collecte d'objets qui se réduit assez vite à peau de chagrin, auquel s'ajoute l'absence totale de quêtes annexes (en guise de quête annexes, on a juste quelques objectifs optionnels ponctuellement au cours de la quête principale). L'inconsistance et la confusion de certains éléments de jeu, tels que la présence et l'utilité ou non de magasins, ou l'alternance de phases de jeu distinctes (comme le cycle ville-donjon dans un RPG classique) empêche l'identification d'environnements et l'établissement d'objectifs à courts termes pour chacun d'entre eux (ex: en ville, discuter avec les habitants et faire le plein d'objet qui serviront ensuite à explorer les donjons, où l'on affrontera des monstres pour gagner et découvrir de nouvelles compétence, et amasser de l'or avec lequel on pourra retourner en ville pour acheter des objets...). Le PNJ qui ont quelque chose d'intéressant à dire se font rare, et on ne peut à aucun moment tomber sur un lieu atypique un peu à l'écart pour lequel on pourrait être heureux d'avoir fait un détour.
Pire, plus on s'écarte du circuit tracé par l'histoire, plus on se heurte à un manque flagrant de finition, des portes que l'on ne peut pas retraverser en sens inverse, des "murs invisibles" en bordure de maps, des PNJ inertes,... auxquels s'ajoutent l'apparition ponctuelles de ressources graphiques hétérogènes qui viennent entacher l'harmonie visuelle.
L'impression de réalisme se dissipe assez vite, et on se retrouve dans un décor, certes plaisant à l’œil, mais artificiel et figé.

Systèmes (Note : 1,5/5)

Une règle apparaît assez vite en ce qui concerne les systèmes de ce jeu: plus ils sont complexes, plus ils présentent de défauts.
Les plus simples (HUD, flash infos, boussole,...) sont finalement les plus réussis. Il ont tous leurs utilité, s'intègrent bien au jeu, fonctionnent bien.
Arrivent ensuite les mini-jeux (tir, QTE, crochetage,...), qui souffrent d'une déconnexion vis-à-vis du reste de gameplay, ont quelques bugs, mais restent en eux-même assez agréables. En fait, c'est probablement les séquences les plus plaisante du jeu.
Et pour ce qui est des différents systèmes du "core gameplay", on observe un manque totalement de cohérence là où au contraire tout devrait s'assembler harmonieusement. J'ai déjà évoqué dans la section gameplay le manque de richesse dans les combats, qui rend les catalyseurs sans grand intérêt. J'ajouterais que ces derniers présentent de nombreux bugs au cours de leur utilisation (ou alors leur fonctionnement est vraiment particulier). Le menu principal est quand à lui surchargé. Tant visuellement, à cause de la superposition d'images et d'icônes beaucoup trop détaillés (les icônes ne collant par ailleurs pas du tout avec l'univers du jeu), que fonctionnellement, puisqu'on utilise au final presque aucune des options proposées en dehors de l'inventaire.

Narration et Mise en scène (Note : 0,75/5)

En 7 heures de jeu, on ne nous aura pas raconté grand chose. Puisque l'essentiel des phases de jeux se limite à un enchaînement de péripéties vides de sens, la narration à proprement parler est reléguée à quelques cut-scenes et monologues. On est donc privé de la richesse narrative que peut apporter la découverte et l'exploration d'un environnement interactif, et l'intrigue en devient un élément secondaire qu'on suit de loin tandis qu'on progresse dans le jeu surtout parce que le jeu nous pousse en avant. Les motivations des personnages sont quand à elles assez floues. On comprends bien qu'on est sensé sauver le monde, mais le ressenti et l'opinion des personnages par rapport à la situation ne sont jamais vraiment évoqués.
Les scènes réalisées directement en events s'empêtrent dans les limites de ceux-ci (mouvement de caméra désespérément rectilignes, fusillades en animations de combat mollassonnes,...), et les recours à des moyens plus spécifiques (artworks, effets sonores, musique,...) souffrent de leur rareté et de leur hétérogénéité. Ils ont de fait plutôt tendance à provoquer la surprise du joueur, qui ne s'attendait pas à rencontrer de tels effets, et à le sortir du jeu. D'autant plus que leur intérêt est parfois discutable (mention spécial au clip d'animation avec les rames de métro).
S'il a été précisé que certains de ces éléments avaient un but spécifique (notamment une chanson qui devait servir de thème/leitmotiv), leur utilisation, et la narration de façon plus général, sont trop maladroits pour que ces effets puissent fonctionner.
J'ajouterais un mot de façon plus spécifique sur les plot-twists par rapport à l'identité des personnages, directement liés à la thématique du voyage dans le temps. Ces astuces pourraient donner des choses intéressantes, mais elles sont de base désamorcées par la piètre écriture des personnages. De plus elles arrivent trop tôt (au bout de plusieurs heures certes, mais comme dit plus haut il s'y passe trop peu d'évènements concrets qui permettraient de s'attacher aux personnages).

Univers (Note : 2/5)

Sur le papier, l'univers du jeu est assez prometteur. Le futur post 3ème guerre mondial où les états ont été remplacé par des grosses corporations, la découverte du voyage dans le temps et son utilisation à des fins géopolitiques et commerciale, tout ça est très riche et aurait pu permettre de développer plusieurs thématiques intéressantes. Malheureusement, même au bout de sept heures de jeu, on ne dépasse jamais le stade du "sur le papier". J'ai déjà mentionné à plusieurs reprise l'empressement du jeu a enchaîner les péripéties sans prendre le temps de développer le moindre contexte. On traverse donc les époques et les situations les unes après les autres (ville envahie de zombies, jungle jurassique, far west,...) et l'univers "concret" du jeu se limite à ce patchwork de décors sans vie.
L'essentiel du background est seulement présenté de façon sommaire, d'abord par le biais d'un cours de fac, puis par des explications à rallonges sur certains détails donnés par les personnages de temps à autre. A aucun moment on n'aura l'occasion de "vivre" ces éléments, d'en faire l'expérience par le jeu. L'histoire elle-même (ou plutôt le défilé de péripéties qui tient lieu d'histoire) ne semble que très peu en tenir compte. Elle semble plus enclin à nous envoyer nous bastonner avec des vélociraptors et des indiens que de nous faire ressentir (par exemple) la pression que doivent subir les Sentinelles, sensées protéger le Temps de façon impartiale mais subordonnée à une corporation, et donc orienté politiquement.
Les rares moments où l'univers prend un peu de substance, comme les flashs infos qui superposent à un quotidien paisible d'étudiante des nouvelles d'évènements catastrophiques mais distants, ou les scientifiques dans le QG des Sentinelles qui annoncent un futur quelques peu mouvementé (mais qu'on tarde à voir venir), semblent presque accidentels.


Personnages (Note : 0,5/5)

Pas la moindre étincelle de vie parmi tout le casting de ce jeu. Aucun personnage ne présente de trait particulier lui permettant de se démarquer des autres. Que ce soit en terme de gameplay, le manque de profondeur des combats les rendant tous plus ou moins interchangeables (cf: section Gameplay), ou au sein de l'histoire, vis-à-vis de laquelle leurs objectifs et leurs motivations sont pratiquement inexistants. Ils sont agents temporels, ils accomplissent leurs missions, et c'est tout. On ne connaît jamais leur ressenti et leur opinion sur ce qu'ils traversent. On ne voit pas non plus évoluer leurs relations. L'essentiel de ces évolutions se fait en hors-champ, pendant une ellipse, avec un résumé en trois mots. Pouf! Machin se met en couple avec Machine, ce qui rend l'ex de Machin vénère! Pouf! Bidule décide de trahir tout le monde! Ça se fait comme ça, en un claquement de doigts, sans aucun signe annonciateur. Les vagues tentatives pour donner corps à ces relations sont superficielles et maladroites. A l'image de cette scène de vie de couple où l'on a rien trouvé de mieux pour représenter leur amour que de montrer l'un des conjoints proposant à l'autre de débarrasser la table à sa place, accompagné d'une bande-son assez malencontreuse (une chanson très mélancolique), donnant au final plutôt l'image d'un couple distant, las, en bout de course. Le reste du jeu, cette relation est réduite aux deux conjoints s'appelant "chéri" à tout bout de champs (même au milieu d'une mission risque, même en situation de danger de mort), de la même manière qu'une aversion se limite à des volées d'injures intempestive. Ce qui ne développe absolument pas les relations en question, mais informe simplement le joueur de leur existence.
Car en fin de compte, et c'est bien là l'essence du problème, les personnages ne sont là que pour ça : donner des informations, au détriment de leur personnalité. La plupart des répliques sont de simples descriptions de la situation ou d'un élément de lore, sur un ton extrêmement formel. De la même manière que le scénario nous lâche quelques miettes de contenu dans un torrent de péripéties, le développement des personnages se limite à quelques bribes coincées entre deux avalanches d'informations. Par exemple, le fait qu'Amanda décide de ne plus prendre ses pilules aurait pu donner lieu à toutes sortes d'évolutions intéressantes : une méfiance grandissante vis-à-vis de la corporation à cause de choses qu'elle aurait dû oublier, un éloignement du reste du groupe, qui lui ne se doute de rien et ne comprend pas ce qui lui arrive,... Mais non, elle se contente de se demander, entre deux péripéties, si ça va influencer sa relations avec son chéri d'amour, et puis on laisse tout tomber et enchaîner sur la suite. Du coup on ne sait même pas vraiment ce qu'elle sait et ce que les autres ont oublié, donc ça finit par sembler assez dérisoire. Dommage...


Introduction (Note : 1/5)

L'introduction a au moins le mérite d'être assez représentative du jeu. Elle prend la forme d'un flash forward où l'on assiste à une mission d'Amanda qui va virer à l'eau de boudin. Nous voilà donc à New York en 1929. C'est du moins ce que dit le texte incrusté au début. Le contexte de l'époque n'est pas développé, pas plus qu'un quelconque propos qui se baserait dessus. Les méchants sont venu à cette époque pour gagner des sous, ça s'arrête là. Par contre les dialogues sont saturés de demi-informations sur les personnages et les voyages dans le temps, avec une ou deux punch lines clichés de temps à autre.
Nous voilà donc infiltrés dans l'entrepôt qui sert de QG aux méchants, où nous sommes initié au gameplay du jeu, notamment à sa diversité et à son inconsistance. La partie infiltration se limite à ne pas entrer dans une salle où se trouve un garde, après ça on peut directement engager des combats avec les gardes. Combats qui nous met un tas de compétences dans les pattes, ce qui est justifié par le fait que ce soit un flash forward et que les personnages sont déjà expérimentés, mais pas vraiment approprié pour une initiation. Cela dit on remarque assez vite que ces compétences sont très redondantes et qu'on a juste à spammer la plus puissante pour que ça marche. A côté de ça on fouille l'entrepôt à la recherche d'un passage secret. Mais le méchant a pris soin de laisser des indices derrière lui histoire qu'il soit pas trop secret. Donc plutôt que d'explorer à proprement parler, on se contente de suivre les instructions. D'ailleurs tout écart de ce chemin prédéterminé entraîne quelques curiosités, comme le personnage qui constate l'absence d'interrupteur caché en examinant une étagère, alors qu'il n'a pas encore de raisons d'en chercher un. Tout ça en se frayant un chemin dans une map surchargée, avec de temps à autres l'introduction d'une mécanique de jeu qui sera pas ou peu exploitée par la suite (l'une des deux seules utilisations du saut se trouve ici, par exemple).
Amanda finit par être séparée de son équipé et gravement blessée lors d'un affrontement, Le méchant s'enfuit sans l'achever, elle tente de s'échapper de l'entrepôt en flammes en mentionnant un certain Andrew qu'on oubliera assez vite puisqu'il est évoqué de façon assez peu mémorable et qu'on reparlera pas dans les 7 heures de jeu qui suivent, un mystérieux sauveur vient à sa rescousse et elle se réveille dans un endroit tout blanc et tout lumineux en disant "Où suis-je?" et en insistant un peu trop sur le fait qu'elle aimerait bien avoir une chance de corriger ses erreur (dans un jeu qui parle de voyages dans le temps quelles sont les chances que ça arrive?...). Cette tentative d'accrocher le joueur en attisant sa curiosité est vaine à cause de l'accumulation de clichés et du manque d'élément concrets présentés au joueur. Pourquoi voudrait-il en savoir plus à propos d'un personnage ou d'un contexte qu'il connaît trop peu pour s'y attacher?

Graphismes originaux (Note : 0/5)

(Ce jeu ne participe pas à cette catégorie compétitive)



Musiques originales (Note : 0/5)

(Ce jeu ne participe pas à cette catégorie compétitive)




Conclusion (Note totale : 1/5)

Si une quantité de travail indéniable a été investie dans ce jeu, elle l'a malheureusement été au mauvais endroit. L'auteur a manifestement privilégié la quantité à la qualité, et le superficiel au fondamental. Sa préoccupation première était sans doute de donner corps à son univers, le jeu n'étant qu'un support. Aussi a dû-t-il s'empresser d'aligner les péripéties et empiler les mécaniques de jeu, en espérant étoffer son univers par cette diversité qu'il évoque dans la fiche du jeu, ce qui fait que le joueur est trainé en avant tout au long du jeu pour lui montrer toujours plus, sans prendre le temps de soigner ce qu'on lui montre. C'est un problème assez fréquent.
Mais comme je l'ai répété plusieurs fois au cours de ce test, un univers ne peut prendre vie que si on prend le temps de lui donner une consistance, par un scénario qui en explorer les différentes facettes au travers de personnages crédibles qui sont directement confrontés à ce contexte, par un gameplay qui permet d'en faire soi-même l'expérience. Tout cela fait cruellement défaut. Ce qui est dommage puisque l'univers pourrait vraiment donner matière à un jeu intéressant. Aussi j'encourage vivement l'auteur à revoir ses bases en matière de conception de jeu et d'écriture de scénario, et surtout de prendre plus de temps pour peaufiner les détails, afin pouvoir lui faire honneur.


Remarques diverses

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Ce test est-il bien rédigé, compréhensible, complet, respectueux ?

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